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L'Histoire des femmes au Japon : Ou est l'origine de la hierarchisation sexuelle? 利用統計を見る

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L'Histoire des femmes au Japon : Ou est

l'origine de la hierarchisation sexuelle?

著者名(日)

棚沢 直子

雑誌名

経済論集

34

1・2

ページ

67-77

発行年

2009-03

URL

http://id.nii.ac.jp/1060/00002324/

Creative Commons : 表示 - 非営利 - 改変禁止

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東洋大学「経済論集」

34巻1・2合併号 2009年3月

     L’Histoire des femmes au Japon

Ou est l’origine de la hierarchisation sexuelle?

Naoko Tanasawa

lntroduction

        Les recherches sur rhistoire de rAsie, Iorsqu’elles sont faites en France, auraient, consciemment ou non, une tendance de la mettre dans le cadre d’‘‘une et seule temporalit6 mondiale”dans Iaquelle l’Occident es目e plus en avance. Cette temporalit61ineaire, acceleree a 1’6poque modeme par l’obsession de l’id6e de progres, exergait selon Simone de Beauvoir une influence d6cisive sur le rapport de sexe des l’aube de I’Histoire de Phumanit6;sans maternite,1es hommes ont pu avancer dans le temps plus vite que les femmes(BEAUVOIR l 976,1:40,61,75,107,113)(1), D’oU la dichotomie et son corollaire la hi6rarchisation homme-femme, attribuant aux hommes la part de la culture, de 1’esprit, de la raison...et aux femmes celle de la nature, du physique, de la sensibilite_Au commencement de l’Histoire, donc,6tait 1’oppression des

允mmes.

        Dans ce contexte conceptue1,0n peut comprendre que la temporalite des histoires asiatiques parait avoir un rythme plus lent par rapport a celle de rOccident En effet, sans le sens aigu du progres on peut y observer une coexistence pemanente present-passe. Cela nous mene a supPoser qu’en Asie il y aurait une autre modalit6 qui soit dominante:nous pensons particulierement a celle de respace. Cette“spatialite”-la, neologisme a defaut d’un mot adequat, devrait jouer un r61e auprさs du temps en lui domant un rythme peu pressant sinon“immuable”(2). Dans ces evolutions,1a dichotomie homme-femme a 1’occidentale apparaissait plus ou moins incertaine, ce qu’on verra d’ailleurs dans cet article. N6anmoins, cela ne veut pas dire qu’il n’y existait pas une hierarchie sexuelle. Bien au contraire, elle paraissait, a 1’6poque pr6moderne-du 16e i ok au lge siさcle-et modeme, plus sevさre qu’en Occident.         Ainsi donc, ces questions sont pos6es:aquel moment et a quel niveau social commence la hi6rarchisation de sexe?Avec quels changements politiques et sociaux se consolide-t-elle au cours de 1’histoire?Enfin, de nos jours, quelles cons6quences cette histoire exerce-t-elle sur les femmes dans Ieur vie quotidienne?N皿s voulons les examiner a travers le cas du Japon, en nous appuyant sur des 6tudes tres

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r6centes menees dans notre pays.         Notre analyse se d6roulera autour des trois axes:d’abord 1’articulation du rapport de sexe avec celui de g6n6ration, ensuite la maniさre de formation de la“famille”(3)a 1’interieur de la communaut6, et finalement le processus d’une separation stricte de la sphere publique d’avec la sphere priv6e. Tout cela entrera en jeu dans le changement de place des femmes au sein de notre soci6te.

LDu 5e au 8e siecle

        L’histoire du Japon contient de riches documents d’une premiere fbrme de matrilocalit6, au moins, jusqu’a la fin du 8e siecle. A cette 6poque, dans presque toutes les couches sociales, existait un mode de vie selon lequel mari et femme n’habitaient pas ensemble. Cela exprime le fait que chacun appartient, meme aprさs le mariage, a sa communaute d’origine. Le mari fait des allers-retours entre le logement de sa femme et le sien. Les etUdes sur cette epoque nous disent qu’on trouve di伍cilement des cas contraires(4). Les enfants, eux, restent chez leur mere. C’est donc l’ancienne forme matrilocale.         Comme la vie des femmes et de leurs enfants etait assur6e par leur communaute, divorce et remariage etaient frequents. Il n’y avait d’ailleurs aucun code ecrit sur le mariage. S’il se faisait au sein d’une toute petite communaut6, il arrivait aussi qu’il soit conclu entre deux communautes de diueses tailles. En tout cas, ce systeme d’habitation s6par6e montre qu’a cette 6poque le lien de generation, g6r6 principalement par les femmes,1’emporte sur le lien homme-femme, ce qui fait de la femme, non la compagne du mari, mais une personne relativement independante de celui-la. Il est donc impossible d’a伍㎜er qu’ils fbrmaient un “couple”comme unit6 de vie;aplus fbrte raison, le d6veloppement de la famille comme unit6 de vie s’≠垂?窒№盾奄煤@tres peu au moins dans les couches populaires;on appelait, meme sans Iien de sang, tous les villageois adultes “の7a”, c’-est-a-dire,‘‘parents”hommes-femmes non diffるrencies. Ces‘‘のノゴ’veulent s’aider entre eux et prot6ger tous les petits p皿r la survivance de leur communaut6・         Mais dans les couches dominantes, on voit, deja aux 4e et 5e siecles、 le d6veloppement de la notion de lignee;chaque nom est octroye par 1’empereur dont la lignee est, elle aussi, en pleine formation. On peut supposer qu’il voulait donc par cet acte se distinguer et s’affirmer comme etant de lign6e superieure aux autres, La transmission de nom des lign6es se faisait par patrilin6ait6 et matrilin6arit6, les deux parallさlement. Avec ces lign6es naissantes commence a se former la notion de“maison”comme unit6 de production et de gestion des biens qui domine un certain territoire compos6 de plusieurs communaut6s.         Nous pouvons constater par ces systさmes matrilocal et bi-1ineaire g6neralis6s que, jusqu’a la fin du 8e siさcle au moins,1’avenement du patriarcat au sens strict du teme(soit, entre autres, patrilineaire et patrilocal exclusifs)n’avait pas eu lieu au Japon. Les historie㎜es specialis6es en cette matiere sont

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L’Histoire des femmes au Japon unanlmes sur ce polnt.         Ainsi les femmes pouvaient-elles partager les pouvoirs politiques a la fbis au niveau central et

communal.

        Un exemple:du 6e au 8e siecle, a la diff巨rence de la Chine ou de la Cor6e de 1’epoque, huit rさgnes imp6riaux sur dix-sept ont ete f琶minins, au total 92 ans sur une p6riode de 200 ans, soit a peu pres la moiti6 du temps. Les candidats au tr6ne sont recommand6s‘‘sans distinction de sexe”, expression employ6e par un chercheur specialis6 en systeme imp6rial de 1’ancien temps(5)(6). La capacit6 a gouverner et 1’appartenance a la lign6e imp6riare sont les qualit6s essentielles pour succeder a la couronne. Cependant une condition suppl6mentaire est n6cessaire pour les femmes:elles doivent etre veuves ou c61ibataires, S’il est habituel chez les empereurs masculins de l’epoque ancienne d’avoir plusieurs epouses, cela ne signifie pas que celles-ci soient soumises a 1’autorite de leur mari. D’ailleurs, ils n’habitent pas ensemble:chacune a sa propre“maison”comme logement et comme unite de production et de gestion des biens. Et l’6pouse officielle partage le pouvoir politique avec l’empereur. Ce mode de partage homme-femme des pouvoirs est erig6 en systeme non seulement au sein du regime imp6rial mais surtout lors des elections d’un chef de

communaute ou de runion des communautes. Ces femmes-empereurs ou ces chefs de(Funion des)

communautes avaient 1’habitude de s’armer en tenue de combat et de se battre comme les hommes pour le compte de leur peuple.         Un autre exemple:c’est au cours du 7e siecle que le bouddhisme prend son essor au Japon. On 6difie alors des temp[es provinciaux dans une soixantaine de‘‘diocさses”atravers le pays,11s sont to司ours associes a la construction d’un autre temple pour bonzesses. Quant au shintoisme, religion autochtone du Japon, la divinit6 solaire Amaterasu-deesse par excel[ence mais a la fbis dieu, les deux⑨exes non diffl(…rencies devient a la fin du 7e siecle la d6ite supreme du panth60n, Tous les diωx, locaux ou non, ont leurs sanctuaires hierarchis6s en fbnction de celui d’Amaterasu a Ise. Les officiants villageois pour Ies fetes religieuses sont choisis sans distinction de sexe. Apres la c6remonie tous les villageois, hommes ou femmes, discutent des problさmes locaux. Ces fetes sont donc une belle occasion de deploiement des pouvoirs politiques communaux.         On peut donc r6sumer, en ces trois points, comment les femmes vivent dans une civilisation oU est dominante la“spatialit6”apparue comme rancienne forme de matrilocalit6. Premier point:Plus que le rapport de sexe, celui de gen6ration, assur6 par les femmes, semble etre d’une importance primordiale, Deuxiさme point:C’est pourquoi la dichotomie sexuelle est incertaine et, ce qui en r6sulte, la formation d’un couple cor加gal n’apparait pas n6cessaire. Troisieme point:la solidarit6(ou la contrainte)de la communaute ne favorise pas, surtout dans les couches populaires, le d6veloppement de la famille comme unit6 de vie,

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        Tout cela apporte aux femmes des avantages d’exercer des pouvoirs politiques. Ainsi pourrait-on presque dire que la place des femmes dans la communaut6 etait egale a celle des hommes.         Mais, meme dans ces conditions, on observe quelque germe de hierarchisation homme・・femme. ll est visible surtout au niveau central et dans les couches sup6rieures. Par exemple, la lignee imp6riale du 8e siさcle en pleine consolidation n’est pas(plus?)celle des femmes. Par leurs pouvoirs politiques exerces, les femmes-empereurs gardent et transmettent aux successeurs leur propre sang mais patrilin6aire・On ne sait pas, dans nos 6tudes actuelles, s’il existait dans un plus ancien Japon une matrilin6arit6 exclusive. On pourrait donc co面㎜er qu’une des premiさres formes de hi6rarchisation sexuelle commence avec la lign6e imp6riale. II. Du ge au 18e siecle         La pr66minence masculine commence a s’observer dさs le 9e siecle. A quelques exceptions pres, un cas au l 7e et l’autre au 18e siecle, les femmes ne deviennent p加s empereurs a partir de la fin du 8e siecle工a tendance de leur exclusion de la sphさre politique apparait progresslvement. La gemination de l’h696monie masculine prend forme a partir du moment oti les epoux habitent ensemble. Une evolution fort lente aboutira ala fin a un patriarcat rigoureux pour les femmes. Cela se produit d’abord dans les couches dominantes工a hi6rarchisation sexuelle s’acc61ere avec ces trois etapes:         Premierement, r arriv6e au pouvoir politique de la classe guerriere en l 192. La naissance de cette classe remonte au ge siさcle. Au cours des siecles, ces militaires-paysans sont devenus nombreux, sufflsants pour former une classe. Et ils finissent par chasser officiellement les femmes de la sphere politique.         Deuxiemement,1’avenement du patriarcat(patrilineaire et patrilocal), vulgarise du l 4e au l 5e siecle dans presque toutes les classes sociales. Le modさle de ce patriarcat est celui de la classe guerriere:non seulement mari et femme mais aussi les grands parents du c6te de mari habitent sous le meme toit. C’est la 飴mille patriarcale de cohabitation de trois g6n6rations o心la bru doit obeirムtous les membres adultes, au moins jusqu’a ce que son mari succede au patrimoine de son pere,         Troisiemement, la s6paration de plus en plus stricte de la sphere publique d’avec la sphere priv6e a partir du l 7e siさcle. Elle est accompagn6e de la division du public/masculin et du priv6/f6minin. Le r6sultat: les femmes sont enferm6es progressivement dans leur maison.         N6anmoins, ce qui caract6rise notre histoire, nous 1’avons d(}jb signal6, c’est la lenteur de son 6volution. Par exemple,1’habitation s6paree mari-femme continuera tout au cours de 1’6poque Heian(de 794 all92)et survivra un peu partout au moins au l 5e siecle(7). Ainsi la g6neralisation de 1’h696monie masculine se fait・・elle en l’espace de_1000 ans!Comme si dans l’histoire du Japon existait une“zone amortissante”, qui absorbe toutes les contradictions, voire toutes les dialectiques dichotomiques, et qui

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L’Histoire des femmes au Japon empeche une et seule 6volution lineaire. Dans cette zone se situe, donc, la coexistence des systさmes anciens et nouveaux sous une expression accommod6e ou rξgularis6e aux evolutions. On pourrait en donner trois exemples.         Le premier exemple:une nouvelle fbrme matrilocale, apparue des le 9e siさcle dans 1’aristocratie de la cour imp6riale;elle se r6pand progressivement jusqu’aux couches moyennes dans pratiquement tout le territoire du Japon de 1’6poque. C’est le cas du mari qui sejourne un certain temps chez sa femme. On pourrait dire que c’est une forme transitoire entre 1’habitation s6par6e et la pure et simple patrilocalit6. Cette forme a surv6cu jusqu’aux l4e-15e siecles et meme aprさs. L’evolution matrilocale a pour consequence d’abaisser considerablement la posmon des femmes dans la soci6t6:en efffet e1[es perdent le statut de repr6sentante de leur communaut6 et de Ieur lign6e au profit de】eur pere qui sera bient6t potentiellement en concurrence avec le pさre de leur mari. Par cette nouvelle matrilocalit6, quelque signe de la notion de famille se fait sentir;les femmes symboliseront alors tout simplement ralliance entre deux familles naissantes(8).         Le deuxiさme exemple:1a coexistence des deux capitales, du 12e au 14e et du 17e au I ge siさcle, soit au total une duree de plus de 400 ans. En effet, le chef de la classe guerriere ne pensait aucunement a d6truire la cour imperiale de Kyoto;aussi a-t-il pris soin de respecter le pouvoir politique de cette derniere comme auparavant. Il a instaure le shogounat, son propre gouvemement et sa propre capitale(a Kamakura puis a Edo, ancien nom de Tokyo). Des lors, le Japon avait deux siさges politiques centraux:1’un appartenant al’empereur et a 1’aristocratie de la cour dont le pouvoir est peu a peu affaibli;1’autre au shogun, gen6ral de rempereur au sens Iitt6ral, qui acquiert avec le temps un renforcement de son pouvoir enfin inconteste.         Le troisieme exemple:1’espace public installe au sein de l’espace prive. C’est avec l’instauration progressive du l4e au l 6e siさcle de la patrilocalit6, accompagn6e de la division du public/masculin et du priv6/feminin. Prenons un cas:dans les r6sidences des puissantes familles de guerrier,1’espace public r6side dans leur maison:la salle de r6ception appe16e‘‘zashiki”se distingue d’avec la salle de sejour et des chambres a coucher. L’6poux, devenu chef de famille, rさgne sur le“zashiki”tandis que l’6pouse dispose du reste. Lorsque le mari est absent, la femme peut recevoir des visiteurs dans le“zashiki”pour intervenir dans les affaires politiques. Et ceci au moins jusqu’au 16e siecle. A partir du l 7e siecle, elle devra c6der son droit de remplaCante a son fils ain6 ou au vassal principal.         Une 6volution tout en douceur de l OOO ans aboutit en fin de compte a un changement radical et s6vere pour les femmes:de leur exercice du pouvoir politique a la privation de celui-ci, elles s’enferment peu A peu dans la sphere privee. Au fUr et d mesure que les femmes perdent leurs pr6rogatives officielles,1’id6e d’une instrumentalisation reproductrice des femmes se developpe du 17e au l ge siecle, comme le suggerent

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ces proverbes:“Meme avant sa naissance et aprさs sa mort, la femme ne possede pas sa propre maison”ou encore“On prete le ventre des femmes”. Ils nous semblent illustrer la propagation quelque peu manipu16e du systさme patriarcal jusqu’a la classe populaire.         Qu’est-ce qui reste alors aux femmes jusqu’au lge siecle et meme aprさs?La survivance de l’6poque ancienne a一レelle entiさrement disparue?Non, pas tout a fait. Pour ne citer ici que deux exemples:         1.Les femmes continuent A avoir le droit o缶ciel puis offlcieux a exercer des pouvoirs politiques centraux, cette fbis a titre de mさre, Ainsi le rapport de g6n6ration dirig6 par les femmes subsiste apres 1’exclusion des epouses de la sphさre politique. Contrairement au pさre-empereur abdiqu6 qui n’a plus de droit d’entr6e dans le palais imp6rial, la mさre sumomm6e“mere du pays”continue de vivre avec le jeune successeur. Elle intervient souvent dans les affaires politiquesjusqu’au moins au l l e siecle. Elle sera pr6sente en dernier ressort jusqu’au 19e・siecle・sous・forme・de‘‘puissance de la mさre”, et ceci non seulement dans la sphさre priv6e mais surtout en coulisse dans la sphさre politique.         2.Les maisons des gens modestes n’ont pas jusqu’au l ge siecle la s6paration spatiale public-prive・ Le mari s’assoit a c6t6 de sa femme dans une piさce munie d’un foyer. Meme jusqu’en 1940,0n retrouve un peu partout cette disposition dans les demeures japonaises. La place de l’6pouse autour du foyer est design6e par le terme d’”e〃ushi-zα”(place du maitre des lieux), tandis que celle du mari est appe16e”yoko-za”(place a(ljacente). Alors qu’o伍ciellement parlant, le mari est le chef de famille et proprietaire de tous les biens familiaux surtout a partir du 17e-18e siecle;le nom donn6 aux places reflさte bien la distribution des pouvoirs reeis attribu6s a chacun au sein de la famille dans la classe populaire.

m.Du 19e siecle jusqu’a nos jours

        En l 868 a la suite de la retrocession du pouvoir par le shogun a Pempereur, le gouvemement de Meij i essaie de d6finir r61e et image d’empereur et d’imp6ratrice en vue de servir d’un modele de couple pour les japonais moyens. Pour la premiere fois dans notre histoire,1’imp6ratrice en costUme europ6en est apParue en carrosse devant le public;elle est restee a c6t6 de 1’empereur tout au long de la c6r6monie de la proclamation en l 889 de la Constitution de l’Empire du Grand Japon. C’6tait une d6monstration, a destination des pays europeens, que le statut des femmes est maintenant 6gal h celui des hommes, preuve d’une nation civilis6e. Le Japon s’occidentalise et se modernise pour echapper au risque d’une colonisation par les puissances occidentales.         Cependant, les femmes ne peuvent pas prendre part a la vie politique. De surcroit, instaure en l 898, le droit civn de Meiji, inspir6 en partie par le code Napoleon, octroie aux hommes toutes les pr6rogatives. Ladite “modernite occidentale” cr6e ainsi un ecart immense entre image et r6alite. La vie moderne enleve aux

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L’Histoire des femrnes au Japon femmes certains pouvoirs r6els, d(…tenusjusqu’alors.         Au cours de la militarisation de plus en plus intensifi6e dans la premiさre moiti6 du 20e siさcle, le

gouvemement commence a remplacer l’image de rimp6ratrice en costume euroP6en par celle

d’のo-Ama’erasu. C’etait pour mobiliser le peuple et le mener jusqu’a la victo廿e dans la deuxiさme guerre mondiale. Cette divinit6 solaire, dont le sexe 6tait controverse pendant la periode du patriarcat rigoureux au 18e siさcle, est redevenue Mさre-Pere non differenci6e, symbole de la Grande Nation-Famille. L’autorit6 est calqu6e sur le rapPortの7a-enfant incarn6 en celui d’Amaterasu avec l’empereur. Celui-ci est aussi en quelque sorte identifi6 au Pere-Mere qui protege par son‘‘amour rayonnant”ses s司ets comme ses“b6b6s”(sekishi). On sait comment le militarisme totalitaire a utilis6 en sa faveur rimage de la Mさre. C’etait d’ailleurs d’autant plus facile pour le Japon en vertu du r61e d’Amaterasu et de rimportance du rapport intergenerationnel dans son histoire,         Depuis la defaite e日a reddition sans conditions en l 945, le Japon est devenu un pays d6mocratique, surtout avec sa Constitution promulgu6e en 1946 qui a伍rme clairement l’egalit6 de sexe. Nous avons connu a peu pres comme en France‘‘les Trente Glorieuses”jusqu’en l 975. Durant la derniere decennie de la fbrte croissance 6conomique, le gouvemement japonais a i可ecte des fbnds colossaux pour aider les entreprises, tout en limitant a un niveau minimal les depenses sociales. Le r6sultat:la responsabilite quasi entiere de prise en charge des e頭nts et des persomes ag6es d6pendantes est attribu6e non a 1’Etat mais a chaque f()yer, c’est-a-dire, aux femmes.         Cela correspond a la politique gouvemementale imposant au peuple un modele mari-femme qui conviendra a cette structure 6conomique a la japonaise」l consiste en ceci:al’homme, que les femmes sumomment ironiquement“le soldat industrier’ou‘Ψabeille ouvriere”revient le d6veloppement capitaliste, et a la femme, ce qui est inconcevable en France,“la femme au foyer dip1δm6e de 1’enseignement sup6rieur” (kogakureAゴぷe〃9γo shufu)revient la prise en charge de tout le reste. Pour cela, elle possさdera un pouvoir r6el qui devrait etre, si c’etait le cas en Occident, soit accord6 au mari, soit pa宜ag6 avec lui. La femme apparaitra alors, selon[a formule gouvernementale, comme“proprietaire et PDG du foyer-entreprise”(9).         En fait, Forigine de ce modele remonte aux annees l 920, Connaissant les brillantes activites des femmes occidentales pendant la premiere guerre mondiale, les intellectuels japonais, responsables de l’6ducation sup6rieure pour les jeunes filles, les encourageaient avec un slogan distribuant plus ou moins inconsciemment les r61es sexuels juste contraires a la pensee occidentale:“les hommes, d6tenteurs de la civilisation mat6rielle;les fbmmes, detentrices de la civilisation spiritUelle et morale”. On pergoit ici un echo assez fidele en cette distribution de r△les au fbyer:d’”enushi.zゴ’aux fヒmmes et d”》oXo-zα”aux hommes

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lors de l’6poque premoderne.         Quelle en est la r6action des femmes de nos jours?Toutes les statistiques recentes montrent qu’elles ne desirent plus rester tout le temps au fbyer Elles ne se contentent plus seulement de leur position de ‘‘垂窒盾垂窒奄Utaire-PDG”du fbyer et de leur‘‘puissance de mさre”. Elles aspirent a se realiser aussi dans des activit6s professionnelles leur permettant de gagner leur vie.         Quels sont donc les obstacles m勾eurs p皿r les femmes qui esperent vivre a part entiさre dans la soci6te contemporaine?Malgre un leger inflechissement du gouvernement,-la r6alisation de 1’assurance de prise en charge des personnes ag6es en l 9970u le vote en 1999 de la loi sur‘‘la participation conjointe des hommes et des femmes dans la soci6t6”etc.一, sa politique ne change pas quant au fbnd. Aucune mesure efficace en matiere d’assistance aux mさres-travailleuses dans la soci6t6. Pas de loi pour la parit6 aux l6gislatives;pas d’egalit6 r6elle des salaires dans le monde du travail. Plus grave encore, il n’existe aucune parit6‘‘domestique”non seulement pour les taches menageres mais surtout pour la prise en charge des enfants et des persormes ag6es dependantes.         Quelle est la cons6quence la plus directe de ceロe carence du gouvemement pour les femmes?Cela nous semble se manifester dans la baisse du taux de natalite, deja amorc6e depuis environ 20 ans. En 20051es m6dia annoncent le“choc L25”, c’est-a-dire, une femme a en moye皿e l.25 en白nt pour toute sa vie. En 2006 la population cornmence i diminuer:il en r6sulte 1’acceleration de son vieillissement,1’esperance de vie au Japon etant la plus elev6e du monde, tant pour les femmes que pour les hommes.         Tbute cette attitUde du pouvoir en place et toute cette n6gligence dans notre climat moral, incapables de repondre a l’aspiration des femmes, proviennent, pour une large partie, des moeurs ayant emerge dans les periodes pr6moderne et modeme, a la suite de la division stricte entre public/masculin et priv6/feminin. Et, c6t6 femmes, malgr6 leur souhait de participer aux activit6s professionnelles, il sera di缶cile d’aboutir a un changement fbndamental, d’autant plus qu’elles seules peuvent avoir dans la famille non seulement un r6el pouvoir, financier et 6ducatif, mais surt皿t, a condition qu’elles ne divorcent pas, un espace de loisirs apPr6ciables pendant l’absence de leur‘‘abeille ouvriさre”;elles peuvent utiliser ces loisirs aux activit6s culturelles(voyages entre elles etc.), sociales, et civiques.         En tout cas, pour changer la sitUation des femmes dans son ensemble, il faudrait transformer toute la structure economique bas6e sur la division public/masculin et priv6/f6minin. L’obstacle le plus grand est donc la structure 6conomique elle-meme. Sa transfbrmation en faveur de l’activite professionnelle des femmes sera un enjeu de grande envergure pour le Japon. Manifestement, elle prendra encore pas mal de temps.

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L’Histoire des femmes au Japon

Conclusion

        Dans l’histoire du Japon,1’introduction de changements cruciaux dans les sys砧mes politiques et sociaux, venus le plus souvent de la classe dominante, ne d6truisent pas les anciens modes de fonctionnement qui trouvaient encore longtemps leur place dans Ia societe. L’int6gration des perdants dans la societ6, plut6t que leur exclusion totale, telle est a notre sens une des caract6ristiques bien marquantes de notre histoire.         Si on examine 1’origine de nos arts tres apPreci6s de nos jours, tels que le jardin zen, le n6, le kabuki etc., on s’apergoit que les createurs venaient, dans la plupart des cas, du bas-fbnd de la societ6. Les femmes et les artistes, consideres a 1’epoque ancienne comme proches du sacr6, trouvent leur expression dans le domaine de la cultUre apres la d6gradation de leur position dans la soci6t6.         Ainsi, par exemple, le kabuki a ete cr66 au d6but de 1’epoque pr6moderne(fin 1 6e si6cle)par une femme d’origine louche;elle est venue a Kyoto, installant au d6but une cabane de spectacle dans une petite ile du fleuve Kamo, habit6e par les bas-f()nds de la soci6t6. Grace a ses r61es en femmes de differentes classes et surtout en hommes d6guises, la popularite du spectacle est devenue grande, a tel point les dames du shogounat venaient le voir en cachette. Mais, apres sa mort, ce spectacle sera appropri6 par les hommes. Et, avec le temps, la transmission du kabuki sera monopolis6e de pere en fils par des lign6es progressivement renomm6es dans ce domaine. Encore, de nos jours, puisque les acteurs se d6guisent en femmes, ces dernieres ne peuvent jouer sur scene. Malgr6 cela(ou pour cela meme), la plupart des spectateurs du kabuki sont des femmes au foyer hautement cultivees.         Reste a v6rifier dans quelle mesure 1’histoire japonaise que nous venons d’esquisser contient des 616ments non de 1’Asie mais de la zone pacifique. Car le Japon se sitUe a 1’extr6mit6 de 1”’Extreme Orient”, Notes: 1.En se demandant‘‘comment la hi6rarchie des sexes s’est 6tabliピ(BEAUVOIR I 976;1:107), Beauvoir constate que la   允mme est en允㎜6e, par la maternit6 et par les travaux domestiques,“dans la r6p6tition et dans 1’immanence”(op.cit.;   1:lIO), alors que l’actMt6 de 1’homme‘‘n’est pas de se r6p6ter dans le temps”(op.c’ど.;1:ll3).‘℃’est de regner sur   rinstant et de fbrger l’avenir”(op.cit.;1:113). Ainsi, ce sont des hommes d6sireux de maintenir les pr6rogatives   masculines qui ont invent6 cette division”((~ρ.cit.;1:ll2). Cit6 par TANASAWA 2002, 2.Beauvolr aj oute une note au d6but de son analyse de r”Histoir♂:”Nous examinerons cette 6volution en Occident.   L’histoire de FOrient, aux Indes, en Chine a ete en effet celle d’un long et immuable esclavage”. Et elle en conclut:‘‘Du   Moyen Age a nos jours nous centrerons cette 6tude sur la France dont le cas est typique”((~ρ.cit。;1,133), En tout cas,

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  Beauvoir ne fait aucune mention sur 1’histoire du Japon dans Le Dettxie’me Sexe. 3.Nous voulons penser, du moins dans cet article, que la notion de“famille”se fbmle a partir du moment oU mari et femme vivent ensemble sous le meme toit. 4.Cf entre autres, YOSHIE 2007. 5.Toshio Araki,“Les pouvoirs politiques et les femmes a 1’6poque ancienne”dans TANASAWA 2007:93-109. 6.La langue japonaise qu’on utilise depuis rancien temps jusqu’a nos jours n’a pas de genre;il n’y a aucun article pour pr6ciser, soit le genre, soit le nombre. Ledit“oya”=parent(s)d6signe homme(s)-femme(s)non differenci6(s). 7.Meme encore jusqu’a la moiti6 du 20e siecle, on observe les pratiques anciennes dans les villages isol6s工e cas le plus   c61ebre 6tant celui de Shirakawago dans Ies montagnes au centre du Japon. Les 6poux habitent quelquefbis de c6t6 de la femme ou y pratiquent meme 1’habitation s6par6e. A notre comaissance, il s’agit, non pas d’㎜systさme r6pandu, mais   d’un choix tacite selon l’exigence de survivance d’un village entier 8。Grace a ce mode matrilocal persist6, les femmes disposent du droit d’h6ritage apres 1’arriv6e au pouvoir de la classe   guerriさre. Originaire du Po血gal, le pere missionnaire Luis Frois, qui est venu au 16e siecle au Japon et y est d6c6d6, rapporte notamment avec stup6faction;“En Europe, les biens sont mis en commun entre les epoux;au Japon chacun garde le sien, et parfois la femme prete et devient 1’usuriere de son propre rnari”(TANASAWA 2007:124). 9.Satoko Nakajima,”L’avenir des femmes au foyer dip16m6es de 1’enseignement sup6rieur”dans TANASAWA 2007:   218-253, R6f6rences bibliographiques l。BEAUVOIR Simone de l 976, Le Deuxie’ me Sexe, I et II, Paris, Gallimard 6d.originale 1949. 2.TANASAWA Naoko 2002,“Les rapports sociaux de gen6ration:une nouvelle conception?”, in DELPHY Christine et   CHAPERON Sylvie(sld), Le Cinquantenaire血De蹴」細θSexe, Nouvelles Questions f6ministes, Paris, Syllepse,   pp.254-258. 3.TANASAWA Naoko 2004,“Conceptualiser les rapports sociaux de g6neration:quelle place pour la mere?“, in BIHR   Alain et TANASAWA Naoko(coordonn6 par), Les rapports interggntirationneis en France et au Japon, Etude comparatルe internationale, Paris, L’Harmattan, pp.37-58. 4.TANASAWA Naoko 2005,“Histoire des Japonaises”, in Keizai Ronshu, vol.30, no.2, Tbkyo, Universit6 Toyo,   pp.133-139. 5.TANASAWA Naoko et NAKAJIMA Satoko(sld)2007, Histoire∂leぷ、fe〃〃nes au/inpon :Une approche垣nCaise(en  japonais), Tbkyo, Shinyosha. 6.YOSHIE Akiko 2007, Essa’su〃’histoire desプbmmes∂1 ’tipoque ancゴenne・auノ卯oη,]r()kyo, Ed.Ybshikawa Kobunkan,

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L’Histoire des femmes au Japon

参照

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