Le Roman
—revision
de Renart , Br. XXV du texte d'E. Martin —
FUKUMOTO Naoyuki
it r vos traiez ca d'une part;
Un fauble dirai de Renart Qui de Hersent s'est departiz.
Il s'an torna par un larriz Tant qu'il vint a une grant voie , Entre .I. champ et une moie . Garda avant, ce of dire, Tant que it vit et se remire , Une croiz desus .I. chemin Qui mout estoit pres d'un sapin, D'un home qui i fu murtriz De ses ennemis desconfiz;
Tue l'orent si ennemi.
Cil parant, li plus pres voising, Cele croiz firent landemain;
Ne tarderent, mais main et main Li assistrent desus son chief...
Ont a terre a for piez botee Et une plainche bien dolee Ont entre les .II. croiz assise;
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Et bien les tient et fait jostise.
Sor la pierre of .I. marregler Qu'entaillie i ont li bergier.
La se seoient per a per
Que je vos sai mout bien nommer:
Li .I. est li fremiz Fremonz, Blans li hermines li seconz, Et li tiers fu Thieberz li chaz, Et Ros li esquiriaux li quarz.
S'orent une andoille trovee Qui mout estoit bien conraee.
Ne sai cui ele fu cheue, Mais cist .IIII. 1'ont receue.
En poinne sont et en tormant Que la partissent igalmant;
Enmi est grosse et graille au chief, De ce est mout granz li meschief;
Quar cele fu par tot honie, Legieremant fust departie.
Tant ont dit et tant ont pule
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17/18 mq. au mains un vers — 21 bie lire bien — 30 a. trove — 35 1. partissent i.
Cette etude est subventionnee par be Ministere de 1'Education nationale du Japon .
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Que tuit ensanble ont esgard'e;
As marrelles la jueroit, Li quex d'aux trestote l'avroit.
Entre Ros et Thiebert le chat Andui estoient d'une part, Si que l'uns l'autre ensoigneroit
Se nus d'aux mestraire voloit.
Fromonz et hermine la blanche Ont andui d'une part la planche;
Bien puet li uns l'autre ensoignier Quanqu'il porra au marreglier.
I1 l'avoient trestot en peis, Et marrelles i avoit pres.
Mes encor ne sevent a dire Qui dou geu soit miadres ne pire, Quant lors danz Renars aparut.
Si conme Faisius traire dut, Garda avant par aventure,
Vit le venir grant aleiire.
Il for crie : "Fuiiez, fuiiez!
Fil a putain, ne vos targiez."
Si con ce of dit li Faissiax, Et li chaz qui mout fu isneax L'andoille prant, sor la croiz monte;
I1 ne dote ne rois ne conte.
Et tuit li autres compaignons S'anfuient tuit a garison.
Renart a Thiebert esgarde, Et cil li a le dos tome.
"Thiebert
, dit il, es tu ce la ? "
Adonc primes le regarda.
"Et dont vienz tu or , Renardin ?
—De cest bois ci, biaux douz eosin Porquoi es tu laissus montez
—Quar plus seiirs en sui assez.
—Comant , fait il, doutez nelui ?
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—Oil . —Et cui ? —Toi et autrui.
Porquoi ? —Quar tel chose teing ci Dont j'avroie le cuer marri
Se par malveste le perdoie. 80
—Ha , ce que est ? A hi dont proie ?
—Oil . Si ne le puis savoir ?
—Oil , mes n'an puis riens avoir.
—Di , va, ce qu'est ? Comant a non ? 84[62v-b]
Di, va! —Andoille l'apelle on.
—Comant , dit il, et par quel art ?
—Ja voir n'an goteras , Renart,
nnAr rnmnaignong hi a. 88
Quar autres compaignons hi a.
--- Ou sont ? " dit il. "Tres bien le sa.
—Aussinc i avrai je ma part .
—Renart , trop i es venuz tart."
Renart se fist mout corrociez, Sovant a ses grenons lechiez;
Li angoissous mout se defripe, Mout art, mout frit, mout se delippe.
Sovant ses yeuz laissus rehuille;
Sor lui n'a mambre ne se duille.
L'andoille iert .1. poi entamee, Plus l'esgarde, plus li agree.
Bien voit Renart n'an avra mie Se granz baraz ne li ayie.
De grant engin s'est porpanssez, Desor la plainche en est montez;
N'i a gaires este en pais, Quant resaut jus tot a .I. fais;
Ses piez bota en l'erbe drue.
"Thiebert
, dit il, havez veue ?
—Et qu'est ce , Renart, qu'avez pris
—Par Deu , ci a une soriz. "
Quant Thiebert of ce nommer, La riens que it puet tant amer, A la soriz tant entandi
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47 nus — que danz corr. par corr. par
50 B. puent 1. — 56 lors avec s ajoute posterieurement Renars a ete ajoute d'une main plus recente — 64 Lad P. Chabaille — 89 1. sai — 92 R. fe s. exponctue — 93 E. Martin
; 1. aparut d. balaye; E. Martin note
oille lire L'andoille — 68 R' et th'
grenos lire grenons — 107 h. haue
Que l'andoille mit en obli.
Au retorner son pie remue, Et l'andoille li est cheiie;
Renart l'ahort ysnelemant, Et l'andoille tantost s'estant.
Thiebert fait duel sor la croiz maire Que nus ne poist plus grant faire.
"Renart
, dit il, Dex fu trahiz;
Qui vos croit, mout par est honiz.
--- Thiebert, dit il, lai moi ester;
N'ai cure de ton sarmoner.
Plus est fox qui en vos se fie;
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Mout vos criai orainz aye, Ne me doignates regarder.
Mes orandroit me puis vanter, Je hai l'andoille a tot la hart.
Plus n'i avroiz ne hart ne part;
Ne me tieng pas a vo coisin. "
Ici prant ceste branche fin.
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Ap. 131: Explicit de l'andoille qui fui juye es marrelles
I MANUSCRIT (=ms. L):
La Br. XXVI se trouve uniquement dant le ms. L (= Paris , Bibliotheque de 1'Arsenal, 3335), ancien 195C, B.F.
"Fol
. A et 124. Fragments de comptes du XVe siecle . Utilise par E. Martin, Le Roman de Renart (Strasbourg, 1882-85); design-6 par la lettre L: decrit t . ler, p.xv. E.Martin donne par erreur a ce manuscrit le n° 3355. Parchemin, 124 feuillets, plus le feuillet A, moins le feuillet 82. 293 sur 200 millim. Ecriture du XIVe siecle , sur 2 col. Initiales en or et couleur. Renards dans le bordure du fol. 1. L'initiale du fol. 1 a ete mutilee. De la bibl. de M. de Paulmy , 'Belles-Lettres, 1724' — Au bas du fol. A; en retournant le volume , on lit: 'Chanpdenyer' — Au fol. 123, on lit: 'Johannes de Cabilon ...' Reliure en veau marbre. "(Henry Martin , Catalogue des manuscrits de la Bibliotheque de l'Arsenal, 1887, p.335.)
Au premier feuillet de garde: `B. L. 1724", et un peu plus bas: "124 feuillets plus le f. prel. A, novembre 1877." Au verso du premier feuillet de garde: en haut: "8" "Ce volume contient outre le Roman de Renard de Jacquemars Gielee plusieurs autres pieces que je n'ay pas eu le tems d' examiner." Une autre main y ajoute en bas: "Ce roman en vers est tres different de celuy qui forme l'article precedent celui ci est plus allegorique plus moral et moins herroique ." Une troisieme main y laisse encore: "voyez ma notte au roman qui forme l'article preced."
Le deuxieme feuillet de garde est un parchemin de compte oil on lit "Despense comune" en grandes lettres; le verso reste blanc.
Le texte se termine au fol. 123r-b: "Explicit de Renart si conme it fu emperieres ." Le verso est plein du griffonage par plusieurs et en bas it y a un dessein de la tete du cheval.
Le fol. 124 est un parchemin de compte qui fait la suite du deuxieme feuillet de garde .
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II NOTES:
"Notre branche a ete composee par un jongleur mecontent de la branche XV , qui raconte que Renart avait ete dupe par Tibert le chat. Il imagina donc que Tibert et ses amis avaient trouve une autre andouille que Renart gagne en faisant croire a Tibert qu'il avait pris une souris. "(Obs., 98).
"I1 s'agit d'une simple fable ou ne figurent que des animaux . Le chat, l'hermine, l'ecureuil et la fourmi jouent a la marelle une andouille qu'ils ont trouvée; mais les joueurs sont mis en fuite par l'arrivee subite de Renard. Tibert saisit l'andouille et saute sur une croix. Le goupil feint alors d' avoir pris une souris, le mets prefer-6 du chat, la riens que it puet tant aimer. Tibert lache aussitot sa prose, dont Renard lestement s'empare." (Bossuat, 146).
P.Chabaille prise notre branche et commente: "Cette branche, d'un langage plus ancien que la precedente (=Br.XXV), a quelque analogie avec un episode du Desputement de la Mesange avec Renart (=Br.XV), ... ; mais les details, et surtout le denouement, en different entierement, et sont plus conformes au caractere de Renart."(Avertissement, x).
Comme it n'existe que le seul manuscrit pour notre branche, ses fautes ne peuvent etre corrigees que par des conjectures; mais, de doute fawon, cette branche n'a pas "d'autre valeur que de completer le recueil des aventures de Renart." (Ex. crit., 43).
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derniers vers que Renart quittait Hersent. Peut-etre etait-ce la branche II sous la forme de la classe ."(Obs., 98).
Nous devons a G. Tilander l'elucidation du terme "larriz"; cf, Rem., 152-59.
"mole" (n . f.): P.Chabaille le note="meule de grain ou de foin". (Chab., 13).
E. Martin propose: "Au v. 14 la rime est facile a corriger: it faut ecrire ami au lieu de voisins. (Obs., 98).
I1 semble que le passage voudrait dire que deux croix traversees par une planche servaient aussi de gibet.
le fremiz Fremonz: (aussi Fromonz 48)
P. Chabaille note (p. 14): l'anon, et cite un passage de Renart le Nouvel; Bauduinz i fu et Fromonz / Fil Timers... (t.IV, p.129).
Mais E. Martin pense que "li fremiz Fremonz pourrait etre le meme que Frimauz li putois de la branche XXIII: en ce cas les quatre animaux qui jouent a la marelle seraient a peu pres de is meme espece: le chat, l'hermine, l'ecureuil et le putois.
Mais on preferera une autre conjecture, d'apres laquelle ce serait Pane Fromond, qui est cite dans la variante I 181: "(Obs., 98). G. Tilander refute ces deux opinions et conclut: "Dans Ren. les animaux les plus différents figurent souvent ensemble, et je ne vois aucune raison pourquoi les quatre animaux de cette br.
seraient necessairement de la meme espece. — Fremiz est une autre forme de fromiz
"fourmi"
, et le plus naturel est de voir ici cet animal-la."(Rem., 184). Il dit aussi:
"Il se peut que comme surnom de la fourmi Fromonz ... ait ete mis en rapport, par une sorte d'etymologie populaire, avec le radical du sb. froment, la croyance paraissant tres repandu au moyen age que la fourmi se nourissait de froment seulement;... Cette croyance provient sans doute de la ressemblance entre les radicaux de froment et fromi. "(Rem., 185).
Cf: Godefroy, t. IV-85 = La Curne de Sainte-Palaye, t.VI-314: fremi=formi (s.
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